Hermès Le Temps suspendu : ô temps suspends ton vol


Pour la Foire de Bâle 2011, le célèbre sellier français Hermès a décidé d’accéder au vœu d’Alphonse de Lamartine qui souhaitait dans « Le lac », l’un de ses poèmes les plus connus, que le temps suspende son vol… En effet, la branche horlogerie de la marque de luxe vient de présenter une montre qui « dompte le temps pour le rendre sien ». Explications.


Poursuivant la démarche qui a vu naître en 2008 la Cape Cod Grandes Heures et son temps sur-mesure, Hermès signe cette année une toute nouvelle complication de l’imaginaire de celles qui domptent le temps pour le rendre sien. Dans la mythologie grecque, Hermès n’est-il pas le petit-fils de Cronos, le Dieu du temps ?

La montre Arceau, imaginée en 1978 par Henri d’Origny, se dote ainsi d’un nouveau module développé en collaboration avec la société Agenhor à Genève et son fondateur Jean-Marc Wiederrecht grand spécialiste des indications rétrogrades du temps. Cette complication non conventionnelle reflète la philosophie du temps d’Hermès : un temps de l’imaginaire, ludique et singulier.

Mais de quoi s’agit-il exactement ? En fait, d’une simple pression sur le bouton poussoir situé à 9 heures, les aiguilles des heures et des minutes viennent s’immobiliser autour de midi, tandis que celle du quantième s’escamote entièrement !

Miracle de la technologie horlogère helvétique ! Le temps s’est suspendu... Ou plutôt son affichage. Car bien entendu, le mécanisme continue de suivre régulièrement l’heure civile, comme un orchestre qui jouerait « backstage », dans le silence de la scène.

Deux minutes, trois heures, cinq jours ou quelques semaines plus tard, à votre guise, une même pression du bouton poussoir repositionne les trois aiguilles à leur juste place : le temps suspendu reprend alors sa course... Inexorablement.

C’est donc un triple système rétrograde qui a été mis au point, dont deux à 360° (pour les aiguilles des heures et des minutes) ; « cette grande première mondiale est protégée par deux brevets » souligne la marque dans son communiqué.

En prime, voici le texte du poème Le lac d’Alphonse de Lamartine

Le lac

Ainsi, toujours poussés vers de nouveaux rivages,
Dans la nuit éternelle emportés sans retour,
Ne pourrons-nous jamais sur l'océan des âges
Jeter l'ancre un seul jour ?

Ô lac ! l'année à peine a fini sa carrière,
Et près des flots chéris qu'elle devait revoir,
Regarde ! je viens seul m'asseoir sur cette pierre
Où tu la vis s'asseoir !

Tu mugissais ainsi sous ces roches profondes,
Ainsi tu te brisais sur leurs flancs déchirés,
Ainsi le vent jetait l'écume de tes ondes
Sur ses pieds adorés.

Un soir, t'en souvient-il ? nous voguions en silence ;
On n'entendait au loin, sur l'onde et sous les cieux,
Que le bruit des rameurs qui frappaient en cadence
Tes flots harmonieux.

Tout à coup des accents inconnus à la terre
Du rivage charmé frappèrent les échos ;
Le flot fut attentif, et la voix qui m'est chère
Laissa tomber ces mots :

" Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices !
Suspendez votre cours :
Laissez-nous savourer les rapides délices
Des plus beaux de nos jours !

" Assez de malheureux ici-bas vous implorent,
Coulez, coulez pour eux ;
Prenez avec leurs jours les soins qui les dévorent ;
Oubliez les heureux.

" Mais je demande en vain quelques moments encore,
Le temps m'échappe et fuit ;
Je dis à cette nuit : Sois plus lente ; et l'aurore
Va dissiper la nuit.

" Aimons donc, aimons donc ! de l'heure fugitive,
Hâtons-nous, jouissons !
L'homme n'a point de port, le temps n'a point de rive ;
Il coule, et nous passons ! "

Temps jaloux, se peut-il que ces moments d'ivresse,
Où l'amour à longs flots nous verse le bonheur,
S'envolent loin de nous de la même vitesse
Que les jours de malheur ?

Eh quoi ! n'en pourrons-nous fixer au moins la trace ?
Quoi ! passés pour jamais ! quoi ! tout entiers perdus !
Ce temps qui les donna, ce temps qui les efface,
Ne nous les rendra plus !

Éternité, néant, passé, sombres abîmes,
Que faites-vous des jours que vous engloutissez ?
Parlez : nous rendrez-vous ces extases sublimes
Que vous nous ravissez ?

Ô lac ! rochers muets ! grottes ! forêt obscure !
Vous, que le temps épargne ou qu'il peut rajeunir,
Gardez de cette nuit, gardez, belle nature,
Au moins le souvenir !

Qu'il soit dans ton repos, qu'il soit dans tes orages,
Beau lac, et dans l'aspect de tes riants coteaux,
Et dans ces noirs sapins, et dans ces rocs sauvages
Qui pendent sur tes eaux.

Qu'il soit dans le zéphyr qui frémit et qui passe,
Dans les bruits de tes bords par tes bords répétés,
Dans l'astre au front d'argent qui blanchit ta surface
De ses molles clartés.

Que le vent qui gémit, le roseau qui soupire,
Que les parfums légers de ton air embaumé,
Que tout ce qu'on entend, l'on voit ou l'on respire,
Tout dise : Ils ont aimé !

Montres-de-luxe.com | Publié le 24 Mars 2011 | Lu 17137 fois

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