Vacheron Constantin : une montre de poche Les Cabinotiers Sonnerie Westminster Pièce Unique


De temps en temps, la manufacture genevoise Vacheron Constantin présente une pièce unique réalisée spécifiquement pour un client. C’est le cas de cette montre de poche en or Les Cabinotiers Sonnerie Westminter qui embarque un calibre grande sonnerie et tourbillon et qui arbore un cadran décoré d’une reproduction en émail miniature du célèbre tableau de Vermeer La Jeune Fille à la Perle, réalisée par l’émailleuse Anita Porchet.


Fruit de huit ans de développement (le projet a démarré en 2013) au sein du département Les Cabinotiers, la montre de poche Les Cabinotiers Sonnerie Westminster – Hommage à Johannes Vermeer vient combler les attentes d’un collectionneur pour qui « la passion consiste à toujours rechercher ce qui, a priori, est impossible à obtenir »…
 
Rappelons que Les Cabinotiers sont un département à part entière de la manufacture Vacheron Constantin, dédié à la création de pièces à exemplaires uniques. Dans la lignée des maîtres-horlogers genevois « cabinotiers » du Siècle des Lumières, l’équipe a relevé le défi de donner corps au rêve de ce collectionneur passionné qui souhaitait une montre de poche hors norme, techniquement et
esthétiquement, dans la plus pure tradition de la Haute Horlogerie du 18ème siècle.
 
Elle est équipée d’un nouveau mouvement manufacture, Calibre 3761, spécialement développé par l’équipe de constructeurs-horlogers de la montre Référence 57260. Ce mouvement à remontage manuel de 806 composants, régulé par un tourbillon, intègre des mécanismes de grande et petite sonneries à carillon Westminster, couplés à une répétition minutes.

Dans l’éventail des complications horlogères, les grandes sonneries ont toujours bénéficié d’une aura particulière, non seulement en raison de la complexité inhérente à ces mécanismes de frappe à plusieurs timbres mais également du fait des qualités musicales requises.
 
Le couvercle officier du fond de la boîte accueille une peinture émail miniature technique genevoise de haute facture représentant La Jeune Fille à la Perle, œuvre du peintre néerlandais Johannes Vermeer datant de 1665. Au-delà du défi de reproduire l’œuvre d’un grand maître, une difficulté additionnelle réside dans la dimension du support de 98 mm de diamètre.
 
Des frises gravées à la main viennent orner les flancs du boîtier avec un décor de feuilles d’acanthe et de tulipes, accompagnées par une lisière « perlée ». La bélière se pare de deux têtes de lion rugissant sculptées dans un bloc d’or.
 
Un carillon Westminster renvoie à la sonnerie mondialement connue des cloches de Big Ben, la tour du parlement britannique à Londres, une mélodie en quatre mesures de quatre notes jouées sur différentes fréquences. En mode « Grande sonnerie », la montre sonne les quarts au passage avec rappel de l’heure à chaque quart, soit trois mesures de la mélodie de Westminster suivies de cinq
notes simples pour 5 heures 45.

En mode « Petite sonnerie », elle sonne les quarts à chaque passage des quarts sans répéter les heures et au passage de l’heure, elle sonne le quatrième quart « le carillon » ainsi que les heures. À tout moment la sonnerie peut être activée grâce au verrou positionné sur le côté de la montre. Celle-ci fonctionne dès lors comme une répétition minutes qui sonne, dans l’ordre, les quarts, les minutes et les heures. Le sélecteur positionné à 9h propose ainsi trois modes possibles.
 
En mode « Sonnerie », la montre s’active automatiquement à chaque passage des quarts à la manière d’une pendule. En mode « Silence de nuit », une particularité spécifiquement développée et adaptée à ce calibre 3761 selon la plage horaire souhaitée par le client, la sonnerie est désactivée entre 23h et 9h, permettant une économie d’énergie autant qu’une tranquillité nocturne.
 
Quant au dernier mode « Silence », il suspend complètement le mécanisme de sonnerie. Un deuxième sélecteur, positionné entre 10h et 11h permet de passer du mode « Grande » à « Petite sonnerie » selon le choix. Les deux barillets offrent une autonomie d’environ 16 heures pour le mécanisme musical en mode « Grande Sonnerie » et de 80 heures pour les indications horaires, avec un couple stable garanti jusqu’à la fin de la réserve de marche.
 
Le calibre 3761 intègre un régulateur de sonnerie centripète qui assure une parfaite régularité des séquences musicales dont les notes doivent s’entendre harmonieusement et distinctement. Le système se caractérise par ses deux masselottes dont la forme très particulière a été optimisée dans le but de générer une sorte de frein moteur – par force centripète – sur l'axe de pivotement du régulateur, lissant ainsi l'énergie libérée par le barillet. Ce dispositif est en outre parfaitement silencieux.

Autre particularité de l’écoulement des heures, le calibre intègre un système de double roue à rattrapage de jeu. Etant donné la taille des aiguilles, pour éviter le chevrotement de celle des secondes positionnée à 6h, un tel mécanisme assure son écoulement fluide et sans à-coup grâce à un système basé sur deux roues dentées coaxiales reliées par un ressort servant à supprimer le jeu d’engrenage.
 
Tous les composants sont terminés à la main, du coq ou pont de balancier entièrement gravé au meulage des ponts à la pâte de diamant pour un rendu poli-bloqué, en passant par le traitement galvanique des platines décorées Côtes de Genève et teintées couleur champagne pour un rendu évoquant la grande horlogerie de tradition.
 
Le travail sur la roue de rochet et les deux roues de barillets représente un excellent exemple de ces tâches méticuleuses. Les roues ont d’abord subi un traitement de surface sous la forme d’un sablage puis d’un soleillage, avant le glaçage des dents sur les cinq portions d’engrenage.
 
Ce type de finition consiste à angler la denture et à lui donner un rendu poli-bloqué sur les parties plates, un savoir-faire autrefois utilisé en horlogerie et que la maison genevoise s’attache à conserver. Une semaine de patience et de minutie a été nécessaire pour la décoration de ces trois composants.
 
L’accordage des timbres demande lui aussi, un esprit perfectionniste. D’abord testés avant emboîtage, ils sont façonnés de manière à obtenir la note juste pour chacun d’entre eux. Ce qui nécessite immanquablement des retouches à la lime pour une sonorité parfaite.
 
Une fois le carillon emboîté, les surprises ne sont toutefois pas exclues. Sur cette pièce, deux des cinq timbres d’origine ont ainsi été remplacés par souci d’harmonie. En modifiant les alliages d’acier, le son des deux nouveaux timbres a pris des tonalités plus cristallines en parfait accord avec les trois autres.
 
Cet « accordage » de la grande sonnerie nécessite ainsi plusieurs emboîtages successifs, le mécanisme devant être extrait pour tout ajustage lors des « repassages en blanc » du calibre. Ce ne sont d’ailleurs par les seuls éléments du mouvement assemblé qui subissent des retouches lors de ces différentes phases, raison pour laquelle elles interviennent avant même la décoration du boîter.
 
Difficulté supplémentaire avec cette pièce unique, il était impossible d’emboîter l’entier du mouvement terminé. Une partie de l’assemblage final devait être fait directement dans la boîte. Etant donné le niveau de finition et de décoration de chaque composant, boîtier compris, et sachant que toute manipulation peut potentiellement en altérer la qualité, les dix opérations de mise en place du calibre, autant de fois retiré pour des retouches, suivis du montage final ont demandé une maîtrise du geste peu commune.
 
Au final, une équipe très restreinte d’horlogers spécialisés a mené à bien la réalisation de ce calibre 3761, des travaux de développement, de fabrication, de terminaison des divers composants jusqu’à l’assemblage final et l’emboitage du mouvement.
 
Par ailleurs, le commanditaire a émis le souhait que le couvercle du fond officier de la boîte accueille une peinture émail miniature réalisée par l’émailleuse Anita Porchet. Son choix s’est porté sur La Jeune Fille à la Perle du peintre néerlandais Johannes Vermeer, réalisée vers 1665.
 
Le résultat rappelle la grande tradition de la peinture émail miniature dont Genève s’est fait une spécialité. Reconnue dès la fin du 16ème siècle pour sa production d’émaux de qualité, Genève a en effet donné son nom à plusieurs appellations faisant référence à la qualité des travaux de ses artisans d’art.
 
Les « émaux de Genève », terme couramment utilisé depuis cette époque, désignent ainsi des émaux peints, recouverts d’un fondant ou « Fondant de Genève ». Cette technique consiste à ajouter aux couches d’émaux vitrifiés une ultime protection transparente et incolore qui confère brillance et profondeur au travail d’artiste. Cette invention a largement bénéficié aux garde-temps de l’époque soumis à des frottements répétés en tant que montre de poche.
 
Seuls quelques rares Maîtres émailleurs maîtrisent encore ces techniques. Il suffit de s’imaginer qu’une seule couche d’émail sur le turban de la jeune fille demande au minimum 2 semaines de travail. La palette de couleurs est à l’avenant avec, notamment, une composition de 7 teintes pour obtenir le noir, sans oublier la vingtaine de passages au four pour fixer les couleurs.
 
Au total, sept mois d’ouvrage, par intermittence, ont été nécessaires pour faire naître ce portrait. Le travail de recherche et de mises au point, notamment au niveau des pigments et des émaux à utiliser, a ainsi démarré en 2018 pour un résultat final achevé en 2020.
 
Si la décoration des montres et horloges via les différentes techniques d’émaillage a largement contribué à la réputation de la Fabrique de Genève qui, au 18ème siècle, réunit l’ensemble des métiers de l’horlogerie et de la bijouterie, les « émaux de Genève » font avant tout référence à la peinture sur émail en miniature.
 
Ce procédé consiste à peindre sur une couche d’émail blanc appliquée sur une feuille de cuivre ou d’or, des couleurs à base d’oxydes métalliques réduites en poudre auxquelles s’ajoute un liant à base d’huile.
 
Le maître artisan pose ainsi ses couleurs comme de la gouache ou de l’huile sur une toile permettant l’exécution, aujourd’hui au binoculaire, des plus infimes détails. Les couleurs sont ensuite fixées à chaque phase par des passages au feu successifs, sans possibilité de retouches.
 
Pour le cadran principal de la montre, c’est la technique d’émail grand feu qui a été retenue dans une teinte coquille d’œuf avec chiffres romains émaillés bleus.
 
Le style des gravures ornant la boîte a quant à lui, fait l’objet d’études minutieuses menées par la graveuse de Vacheron Constantin pour se marier harmonieusement avec la peinture de Vermeer. Après plusieurs propositions et échanges avec le client, son choix s’est porté sur un ornement principal composé de feuilles d’acanthe courant le long de volutes et de fleurs au cœur perlé. Ce motif fait écho au thème de La Jeune fille à la perle par son décor classique et féminin.
 
Grâce aux talents de la graveuse, le rendu est saisissant. Son travail débute par la mise en place du décor avec une pointe à tracer. Elle procède ensuite à la création d’un champlevé qui consiste à creuser un champ plat autour des motifs dont les volumes sont réalisés en les sculptant au burin. L’observation et l’analyse du motif est capital pour appréhender les volumes avant d’inciser le métal.
 
Pour garder le rythme et la souplesse des feuilles d’acanthe tout au long de la ligne qui les accompagne, les courbes doivent être tendues. Les facettes et rayures sont ensuite nettoyées et polies. Ce travail nécessite du temps et de la patience. Le polissage est en effet une opération délicate pour trouver le bon équilibre entre le scintillement du métal et les volumes de la sculpture qui perdent en dynamique si trop arrondis.
 
Afin d’accentuer les ombres et d’apporter des détails aux feuilles et aux fleurs, des traits creux et fins sont réalisés sur chacune d’elles selon la technique de gravure « taille douce » ou gravure par incision ou creusement de la matière.
 
Dernière opération, le ciselage en fond, réalisé à la main point par point, accentue le contraste entre le champlevé ciselé mat et les motifs polis. Cette opération offre une meilleure lecture et sublime le décor par son côté chatoyant. La ciselure crée ainsi un décor ou une texture par frappe, à la différence de la gravure et de la sculpture qui nécessitent de retirer de la matière.
 
L’ornement de la carrure est encore souligné par une double lisière perlée, clin d’œil au tableau de Johannes Vermeer. La réalisation de cette lisière commence par une répartition égale de carrés gravés qui courent autour de la lunette et du fond.
 
Puis la graveuse transforme ces carrés en demi-sphères en se servant d’un perloir, outil du ciseleur creusé à l’extrémité de manière sphérique permettant par empreinte de réaliser des demi-perles de métal. Pour le manier, le geste doit être cadencé et régulier. Les petites perles d’une taille de 8/10ème (0.8mm) sont ensuite polies à la main à l’aide d’une brosse enduite de pâte diamantée.
 
L’effet doit être régulier, tout en gardant le tour de main qui apporte un coté vivant grâce aux reflets semblables mais uniques. Ce décor perlé, particulièrement en vogue au début du 20ème siècle, demande une maîtrise et une dextérité hors pair.
 
Dans le prolongement de ce travail sur la carrure, la bélière constitue à elle-seule une œuvre d’art avec ses deux lions rugissants. Souhait du client, ces sculptures ronde-bosse en trois dimensions sont inspirées de la statuaire classique. D’un incroyable réalisme, sculptés dans un bloc d’or, ils incarnent une rare maîtrise du geste.
 
Avant le travail brut de la matière, la graveuse de Vacheron Constantin a réalisé plusieurs impressions 3D pour déterminer les bons volumes qui lui permettraient d’exprimer son art. Pour la réalisation des têtes des lions, semblables mais non identiques au niveau de la crinière, elle a dessiné à la pointe à tracer les vues des deux profils, de face et du dessus.
 
Il s’agit avant tout de bien comprendre les volumes de la tête en trois dimensions, avant d’entamer la sculpture qui lui fait progressivement perdre les repères tracés au préalable. La tête de l’animal doit être imprimée dans son esprit comme un repère infaillible tout au long du processus afin de lui donner vie et caractère. L’observation et la précision sont essentielles dans la réalisation d’une telle sculpture animalière dont l’expression peut être totalement dénaturée par un geste trop appuyé.

La graveuse s’est d’abord servie d’une fraise pour dégrossir la matière puis de burins pour un travail de plus en plus fin et précis. Les détails des textures satinées, mates ou polies ont été obtenus à l’aide d’outils spécifiques, certains créés pour l’occasion. Au total, cinq mois d’un travail d’une extrême minutie ont été nécessaires à la gravure et à la sculpture des différents éléments de la montre de poche.



Montres-de-luxe.com | Publié le 1 Octobre 2021 | Lu 8594 fois

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