En 1783, Breguet reçoit une commande extraordinaire : un officier des gardes de la reine lui réclame une montre incorporant toutes les complications et tous les perfectionnements connus à l’époque, c’est-à-dire toutes les complications possibles.
Aucune limite n’est imposée, ni en termes de coût ni en termes de délai… Partout où cela est possible, l’or doit remplacer tout autre métal… On peut s’interroger sur le véritable commanditaire d’un tel objet ? Est-ce le roi ? Ce n’est pas impossible. Est-ce un admirateur, un amant ? On l’a beaucoup dit.
Est-ce un groupe qui espère tendre un piège à la reine pour souligner ses folies dépensières –comme un peu plus tard avec l’affaire du Collier ? On ne peut pas l’exclure totalement.
Pourquoi Breguet a-t-il été choisi ? Là, la réponse est plus facile. Bien qu’encore au début de sa carrière –il est à son compte depuis moins de dix ans–, il tient à son actif quelques belles inventions, en particulier la montre perpétuelle, et il est le spécialiste des montres à répétition… Moderne, il renouvelle l’horlogerie sans complexe, et il est discret…
La montre sera donc automatique, procédé que Breguet est le seul à maîtriser totalement à l’époque ; […] Toutes les complications possibles, cela signifie avant tout toutes les précisions astronomiques et calendaires : le jour, la date, le mois, le cycle des quatre ans, l’équation du temps… En somme, on demande à Breguet de faire une horloge de cathédrale dans quelques centimètres carrés.
Le maître se met au travail et le résultat sera la fabuleuse montre n° 160, la Marie-Antoinette, que la reine ne verra jamais puisque, après de longues interruptions, elle ne sera terminée qu’en 1827 sous la direction de Breguet fils. Effectivement, quand éclate la Révolution, la montre n’est pas finie et Breguet a d’autres urgences. Mais, avec la montre n° 160, il a commencé un chef-d’oeuvre qui le dépasse et qui ne peut s’arrêter, une réalisation qui va ponctuer sa vie et celle de la société qu’il a fondée, et ce jusqu’à nos jours !
La montre qui, dans les livres, est qualifiée de « montre d’or » ou de « Perpétuelle répétition-minutes équation du temps perpétuelle secondes d’un coup » survit à la Révolution, et c’est une chance car les ateliers sont saccagés alors que Breguet a dû trouver refuge dans son pays natal, la Suisse.
En 1809, ce dernier décide de reprendre en mains l’ouvrage inachevé, mais c’est surtout en 1812, 1813 et 1814 que les choses avancent […] : il faut dire qu’en ces années de la fin de l’Empire napoléonien la maison Breguet ne peut rien exporter, la France étant en guerre avec tous ses voisins, et ses horlogers ne sont donc pas débordés de travail ; quelle plus belle occupation alors, en attendant la chute de l’Empereur, que de renouer avec un défi tout à la fois technique et plein de réminiscences !
Après 1814, on constate une nouvelle interruption, alors que la montre est presque finie ; puis l’on voit que la montre est reprise en mains en août 1823 ; Breguet veut terminer son chef-d’oeuvre. Il passe le dernier mois de sa vie à travailler à son achèvement, et meurt en septembre ; quatre ans plus tard enfin, la montre est vraiment terminée par les horlogers Breguet, sous la direction d’Antoine-Louis Breguet, en 1827. […]
Aucune limite n’est imposée, ni en termes de coût ni en termes de délai… Partout où cela est possible, l’or doit remplacer tout autre métal… On peut s’interroger sur le véritable commanditaire d’un tel objet ? Est-ce le roi ? Ce n’est pas impossible. Est-ce un admirateur, un amant ? On l’a beaucoup dit.
Est-ce un groupe qui espère tendre un piège à la reine pour souligner ses folies dépensières –comme un peu plus tard avec l’affaire du Collier ? On ne peut pas l’exclure totalement.
Pourquoi Breguet a-t-il été choisi ? Là, la réponse est plus facile. Bien qu’encore au début de sa carrière –il est à son compte depuis moins de dix ans–, il tient à son actif quelques belles inventions, en particulier la montre perpétuelle, et il est le spécialiste des montres à répétition… Moderne, il renouvelle l’horlogerie sans complexe, et il est discret…
La montre sera donc automatique, procédé que Breguet est le seul à maîtriser totalement à l’époque ; […] Toutes les complications possibles, cela signifie avant tout toutes les précisions astronomiques et calendaires : le jour, la date, le mois, le cycle des quatre ans, l’équation du temps… En somme, on demande à Breguet de faire une horloge de cathédrale dans quelques centimètres carrés.
Le maître se met au travail et le résultat sera la fabuleuse montre n° 160, la Marie-Antoinette, que la reine ne verra jamais puisque, après de longues interruptions, elle ne sera terminée qu’en 1827 sous la direction de Breguet fils. Effectivement, quand éclate la Révolution, la montre n’est pas finie et Breguet a d’autres urgences. Mais, avec la montre n° 160, il a commencé un chef-d’oeuvre qui le dépasse et qui ne peut s’arrêter, une réalisation qui va ponctuer sa vie et celle de la société qu’il a fondée, et ce jusqu’à nos jours !
La montre qui, dans les livres, est qualifiée de « montre d’or » ou de « Perpétuelle répétition-minutes équation du temps perpétuelle secondes d’un coup » survit à la Révolution, et c’est une chance car les ateliers sont saccagés alors que Breguet a dû trouver refuge dans son pays natal, la Suisse.
En 1809, ce dernier décide de reprendre en mains l’ouvrage inachevé, mais c’est surtout en 1812, 1813 et 1814 que les choses avancent […] : il faut dire qu’en ces années de la fin de l’Empire napoléonien la maison Breguet ne peut rien exporter, la France étant en guerre avec tous ses voisins, et ses horlogers ne sont donc pas débordés de travail ; quelle plus belle occupation alors, en attendant la chute de l’Empereur, que de renouer avec un défi tout à la fois technique et plein de réminiscences !
Après 1814, on constate une nouvelle interruption, alors que la montre est presque finie ; puis l’on voit que la montre est reprise en mains en août 1823 ; Breguet veut terminer son chef-d’oeuvre. Il passe le dernier mois de sa vie à travailler à son achèvement, et meurt en septembre ; quatre ans plus tard enfin, la montre est vraiment terminée par les horlogers Breguet, sous la direction d’Antoine-Louis Breguet, en 1827. […]
Plus précisément la Marie-Antoinette est une montre perpétuelle, c’est-à-dire à remontage automatique avec masse oscillante en platine, qui est dotée des fonctions et complications suivantes : répétition des minutes, quantième perpétuel complet indiquant le jour, la date et le mois, équation du temps, réserve de marche, thermomètre métallique, grande seconde indépendante à volonté (qui fait de la montre le premier chronographe), petite seconde trotteuse, échappement à ancre, spiral en or, double pare-chute (antichoc).
Tous les frottements, les trous et les rouleaux sont en saphir, sans exception. La montre possède une boîte d’or avec un cadran en émail blanc et un autre en cristal de roche. La superposition et la synchronisation de ces différentes complications, avec tous les calculs que cela suppose, constituent une prouesse incroyable.
Le contrat initial a été largement rempli ; il s’agit de la montre la plus compliquée jamais fabriquée et elle restera pendant près d’un siècle la montre la plus compliquée au monde.
En 1827, l’objet terminé sort des ateliers ; les coûts de main-d’œuvre se sont élevés à la somme astronomique de 17 000 francs-or. La suite de l’histoire pourrait être simple, mais elle ne l’est pas... Alors qu’aucune indication de vente n’est mentionnée dans les archives, la montre quitte la maison Breguet pour y revenir en 1838 quand le marquis de La Groye la confie pour une révision ; il semble en être alors le propriétaire. Quand et à quel prix a-t-il acheté la montre ? L’a-t-il vraiment achetée ? Breguet lui a-t-il offert cette montre ? Mystère. Toujours est-il que le marquis de La Groye, qui en 1838 est fort âgé, a été page de la reine dans sa jeunesse et a connu Breguet sous l’Ancien Régime.
Nouveau mystère : il ne revient jamais chercher la montre et meurt sans héritier ; personne ne réclamant la « montre d’or », celle-ci réintègre le stock de la maison Breguet qui la conserve jusqu’en 1887, année où elle est cédée à un collectionneur britannique, sir Spencer Brunton, avant d’appartenir au frère de ce dernier. Elle deviendra ensuite la propriété de M. Murray Mark, avant d’intégrer au début du 20ème siècle la prestigieuse collection de sir David Salomons. […]
En 1925, à la mort de Salomons, la Marie-Antoinette devient la propriété de sa fille Vera Salomons et l’aventure continue. […] les années passant, Vera Salomons décide de fonder un musée d’art islamique en hommage à son mentor et ami Leo Mayer. Elle met à la disposition de son projet toutes les collections d’art islamique qu’elle possède, et choisit d’y inclure aussi les collections d’horlogerie occidentale héritées de son père. […] Neuf ans plus tard, une triste nouvelle secoue le monde des amateurs d’art et de haute horlogerie : le samedi 16 avril 1983, le musée, dont le nom officiel est L. A. Mayer Museum for Islamic Art, désert et insuffisamment gardé, a été vidé de ses collections d’horlogerie ; naturellement, la Marie-Antoinette a disparu.
Les années passent et, malgré les efforts d’Interpol, le butin reste introuvable. […] En 2005, Nicolas G. Hayek, P.D.G. de la marque Breguet depuis 1999, entre en scène et décide de reconstruire le chef-d’oeuvre.
L’art horloger, orphelin de la montre n°160, doit relever le défi, c’est un devoir pour la maison Breguet renaissante de se mettre à la tâche. Une solide équipe technique se forme et rassemble toute la documentation existante. Le projet avance à un rythme soutenu et la présentation à la presse de la montre reconstituée se déroule au printemps 2008.
Symboliquement, la montre repose dans un somptueux écrin marqueté réalisé dans le bois du chêne favori de la reine. Entre-temps, le 14 novembre 2007, une dépêche est reprise par les médias du monde entier ; le butin du 16 avril 1983 a été retrouvé, au premier rang duquel apparaît, bien sûr, la Marie-Antoinette, vingt-quatre ans après avoir été volée, deux cent vingt-quatre ans après avoir été commandée…
Tous les frottements, les trous et les rouleaux sont en saphir, sans exception. La montre possède une boîte d’or avec un cadran en émail blanc et un autre en cristal de roche. La superposition et la synchronisation de ces différentes complications, avec tous les calculs que cela suppose, constituent une prouesse incroyable.
Le contrat initial a été largement rempli ; il s’agit de la montre la plus compliquée jamais fabriquée et elle restera pendant près d’un siècle la montre la plus compliquée au monde.
En 1827, l’objet terminé sort des ateliers ; les coûts de main-d’œuvre se sont élevés à la somme astronomique de 17 000 francs-or. La suite de l’histoire pourrait être simple, mais elle ne l’est pas... Alors qu’aucune indication de vente n’est mentionnée dans les archives, la montre quitte la maison Breguet pour y revenir en 1838 quand le marquis de La Groye la confie pour une révision ; il semble en être alors le propriétaire. Quand et à quel prix a-t-il acheté la montre ? L’a-t-il vraiment achetée ? Breguet lui a-t-il offert cette montre ? Mystère. Toujours est-il que le marquis de La Groye, qui en 1838 est fort âgé, a été page de la reine dans sa jeunesse et a connu Breguet sous l’Ancien Régime.
Nouveau mystère : il ne revient jamais chercher la montre et meurt sans héritier ; personne ne réclamant la « montre d’or », celle-ci réintègre le stock de la maison Breguet qui la conserve jusqu’en 1887, année où elle est cédée à un collectionneur britannique, sir Spencer Brunton, avant d’appartenir au frère de ce dernier. Elle deviendra ensuite la propriété de M. Murray Mark, avant d’intégrer au début du 20ème siècle la prestigieuse collection de sir David Salomons. […]
En 1925, à la mort de Salomons, la Marie-Antoinette devient la propriété de sa fille Vera Salomons et l’aventure continue. […] les années passant, Vera Salomons décide de fonder un musée d’art islamique en hommage à son mentor et ami Leo Mayer. Elle met à la disposition de son projet toutes les collections d’art islamique qu’elle possède, et choisit d’y inclure aussi les collections d’horlogerie occidentale héritées de son père. […] Neuf ans plus tard, une triste nouvelle secoue le monde des amateurs d’art et de haute horlogerie : le samedi 16 avril 1983, le musée, dont le nom officiel est L. A. Mayer Museum for Islamic Art, désert et insuffisamment gardé, a été vidé de ses collections d’horlogerie ; naturellement, la Marie-Antoinette a disparu.
Les années passent et, malgré les efforts d’Interpol, le butin reste introuvable. […] En 2005, Nicolas G. Hayek, P.D.G. de la marque Breguet depuis 1999, entre en scène et décide de reconstruire le chef-d’oeuvre.
L’art horloger, orphelin de la montre n°160, doit relever le défi, c’est un devoir pour la maison Breguet renaissante de se mettre à la tâche. Une solide équipe technique se forme et rassemble toute la documentation existante. Le projet avance à un rythme soutenu et la présentation à la presse de la montre reconstituée se déroule au printemps 2008.
Symboliquement, la montre repose dans un somptueux écrin marqueté réalisé dans le bois du chêne favori de la reine. Entre-temps, le 14 novembre 2007, une dépêche est reprise par les médias du monde entier ; le butin du 16 avril 1983 a été retrouvé, au premier rang duquel apparaît, bien sûr, la Marie-Antoinette, vingt-quatre ans après avoir été volée, deux cent vingt-quatre ans après avoir été commandée…
Breguet au Louvre : un apogée de l'horlogerie européenne
A travers cette rétrospective de l’œuvre d’Abraham-Louis Breguet (1747-1823), réalisée grâce au soutien de Breguet Montres S.A., le musée du Louvre permet de découvrir à partir du 25 juin 2009, un art à son apogée, incarné dans des pièces uniques de l’horlogerie de précision.
L’exposition présentera ainsi une réunion de prêts exceptionnels –montres, pendules et instruments de mesure– accompagnés de portraits, de pièces d’archives et de brevets d’invention, qui couvrent toute la production d’A.-L. Breguet. A ne pas manquer !
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L’exposition présentera ainsi une réunion de prêts exceptionnels –montres, pendules et instruments de mesure– accompagnés de portraits, de pièces d’archives et de brevets d’invention, qui couvrent toute la production d’A.-L. Breguet. A ne pas manquer !
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